Un fabricant de chevalets retrace la vie des ateliers de Mirecourt du début du xxe siècle aux années 1980

Auteur(s) :
enquêteur : Claudot-Hawad, Hélène
photogr. : Lesaing, Bernard
informateur : Jeandel, Louis (1895-1984)

Editeur :
Phonothèque de la maison méditerranéenne des sciences de l'homme

Contributeur :
Maison méditerranéenne des sciences de l'homme

Notice originale :
http://phonotheque.mmsh.huma-num.fr/dyn/portal/index.seam?page=alo&aloId=9818
mmsh9818

Type :
archives sonores
sound

Description :
Explication de nombreux termes techniques décrivant le chevalet et les outils nécessaires à sa fabrication.
Hélène Claudot-Hawad, ethnologue et descendante d’une famille de luthiers, a mené plusieurs entretiens sur ce métier et s’est rendue en 1982 dans leur ville d’origine et capitale de la lutherie, Mirecourt. Elle y a rencontré des anciens du métier. Le témoin, Louis Jeandel, descend d’une famille de luthiers fabricants de chevalets depuis cent-vingt ans ; son grand-père a créé la célèbre marque familiale Aubert (de son propre nom). Suite aux décès de ses deux maris successifs, sa grand-mère dirige l’affaire, puis elle se fait remplacer par sa fille jusqu’à la seconde guerre mondiale. Louis Jeandel suit son apprentissage dans la maison fondée par son père en 1895 (année de sa naissance), première fabrique spécialisée dans les chevalets à Mirecourt. Il a également une formation de mécanicien spécialiste en fabrication d’outillage spécifique. Après la deuxième guerre mondiale, il réunira les deux ateliers (le premier fondé par son grand-père maternel Aubert et l’autre par son père) et deviendra le seul fabricant de chevalets. Sa production en 1926 atteint 300 000 chevalets par an avec une dizaine d’ouvriers payés à l’heure. Sur un instrument de musique à cordes, le chevalet est une pièce placée entre les cordes et la table d’harmonie de l’instrument : son rôle est de transmettre les vibrations des cordes à la table qui va amplifier le son produit. Le chevalet sert aussi à maintenir l’espacement entre les cordes et, pour les instruments à manche, à les maintenir à la bonne hauteur par rapport à celui-ci. Aujourd’hui, il n’y a pratiquement qu’un seul modèle de chevalets en usage, mais ce modèle a évolué au fil du temps. Louis Jeandel définit la spécificité de cette pratique artisanale : les outils eux-mêmes sont fabriqués au sein des ateliers, l’essentiel étant autrefois le canif. La fabrication à la main des accessoires comme les chevalets, mais aussi les chevilles, les cordiers, a aujourd’hui partout disparu. Héritier de l’histoire familiale, il présente à l’enquêtrice un livre de compte datant de son grand père qui témoigne de la production de chevalets dès 1874 et d’activités annexes comme le débit de bois. Il est catégorique, aucun luthier n’a jamais fait de chevalet. Une des raisons est qu’il faudrait trop de bois. Lui-même achète aujourd’hui 25 tonnes de bois par an alors qu’il en utilise seulement 2 tonnes pour ses chevalets, le reste partant en chutes, sciure et copeaux. En effet, le choix du bois du chevalet – qui pèse 3,5 grammes – doit être très strict et exempt de tout noeud. Il expose la nature, la qualité et la quantité de bois d’érable nécessaire à cette fabrication. Ses clients viennent du monde entier visiter sa fabrique. Il travaille par exemple avec six sociétés au Japon, dont les représentants se sont tous rendus à Mirecourt. Pour palier la crise de la lutherie, il a gardé ses ouvriers et a fabriqué d’autres objets (meubles de radio, de cuisine…) mais, depuis la fin des années 1960, il ne fait à nouveau plus que des chevalets à nouveau. De la profession des luthiers dans son ensemble, Louis Jeandel distingue ceux d’avant et d’après la guerre de 1914-1918, disant que lui par exemple a eu le temps d’apprendre la musique (le violon) et il jouait dans l‘orchestre à cordes de Mirecourt dirigé par le luthier A. Dieudonné. Il répond à l’enquêtrice sur l’état d’esprit frondeur des luthiers (joie de vivre, anticléricalisme, engagement politique, libres penseurs). Bien que soumise à d’importantes heures de travail (à l’atelier et en complément à domicile), toute la profession trouvait des respirations dans ses jours de repos (dimanche et lundi) et ses fêtes (la sainte Cécile, patronne des luthiers). Pour illustrer les conditions difficiles de vie dans cette profession, il souligne avoir vu des médecins exercer gratuitement leur métier afin de soigner les ouvriers. Il considère que son métier est ''luthier'', il n’y a pas de terme spécial pour le fabricant de chevalets. Le récit se prolonge sur la reconstitution et l’énumération des vingt-quatre opérations successives de fabrication d’un chevalet d’autrefois. Chaque opération se distingue par l’outil et son usage spécifique pour traiter la matière, par exemple : traçage ; dehors de pieds ; entailles de genoux ; genoux ; échancrage des ouïes avec canif, ouverture des ouïes avec la scie; limite de largeur des pieds, finissage du pont avec la fraise.

Sujet(s) :
enquête
témoignage thématique
luthier
lutherie
apprentissage
condition de travail
artisanat du bois
mode de paiement
travail des femmes
scierie
jardin ouvrier
entreprise familiale
canif de luthier
outil d'art et d'artisanat
chevalet d'instrument à cordes frottées
secret de fabrication
évolution des techniques
évolution du métier
orchestre
érable
patron
travail à domicile
Dieudonné, Amédée (1890-1960)
Famille Chevrier
Famille Charotte
Darte, Auguste (1829-1892)
Tourte, François, dit Tourte Le Jeune (vers 1747-1835)
guerre de 1914-1918
guerre de 1870
guerre de 1939-1945

Date :
1982-06

Format :
1 cass.
1h 25min

Langue :
français
fre

Couverture :
Mirecourt
48°18'7.83"N
6° 8'1.91"E

Droits :
Un contrat de dépôt a été signé entre l’enquêtrice et la MMSH spécifiant les droits de conservation, d'archivage et de diffusion. Pour des raisons éthiques et juridiques une partie des échanges a été retranchée du fichier en ligne. La consultation de l'enquête dans son intégrité se fait sur place, à la phonothèque de la MMSH (Aix-en-Provence), sur demande motivée.
Extrait en ligne et réutilisation non commerciale autorisée
Consultation en ligne et réutilisation sur autorisation

Relation(s) :
Enquête ethnologique sur les luthiers de Mirecourt (Lorraine)

Type :
archives sonores
sound

Source :
3496

Citation

enquêteur : Claudot-Hawad, Hélène, photogr. : Lesaing, Bernard, et informateur : Jeandel, Louis (1895-1984), “Un fabricant de chevalets retrace la vie des ateliers de Mirecourt du début du xxe siècle aux années 1980,” Portail du patrimoine oral, consulté le 24 avril 2024, http://stq4s52k.es-02.live-paas.net/items/show/116744.